Communiqués

Les Contes d'Hoffmann - anciens communiqués

Avant de fermer un ancien site web, je rapatrie quelques communiqués de 2004, 2005 et 2009, concernant Les Contes d'Hoffmann. La situation éditoriale n'a guère évolué depuis. Bien malheureusmeent... 

 

LE 15 MAI 2009

En ce mois de mai 2009, où en sommes nous de la nouvelle co-édition Kaye / Keck des Contes d’Hoffmann publiée conjointement par les éditions Schottt et Boosey & Hawkes dans le cadre de l’OEK ? 

Depuis l’apparition d’un prototype de partition chant-piano présenté au dernier Salon de la  Musique de Francfort, c’est une question qui m’est souvent posée et à laquelle je me dois de répondre, afin qu’il ne subsiste pas le moindre doute sur l’état d’avancement de ce chantier éditorial. 

Avec les collaborateurs de Schott, et en adéquation avec nos accords contractuels, nous avons défini une méthode de travail. Depuis le mois de novembre dernier, nous avons déjà convenu de la structure même de l’édition (en deux volumes, le premier se référant uniquement au livret de censure de la pièce et le second aux nombreux suppléments et variantes). C’est à peu près à ce stade d’avancement de l’édition que Schott a pris la décision d’imprimer un prototype, afin de présenter quelque chose au Salon de Francfort, même si ce dernier n’est pas du tout significatif de l’édition définitive.

Depuis le mois d’avril, j’ai œuvré à corriger ce prototype, afin que l’édition du premier volume soit rapidement disponible et prête pour le dixième anniversaire de l’OEK que nous fêtons cette année. Au mois de juin, j’espère. 

Actuellement, les copistes de Schott disposent de l’ensemble de mes corrections et modifications. Il leur reste à les reporter et à me confier une dernière relecture avant que je donne mon imprimatur  en tant que directeur de publication de l’OEK. Car, comme je le mentionnais plus haut, lors de mes engagements avec Schott, j’ai veillé à ce que tout soit mis en œuvre pour garantir une qualité optimale du niveau des autres partitions de l’OEK. Notre contrat de coédition stipule qu’en cas de divergence des protagonistes, les deux avis devront obligatoirement figurer dans l’édition, aucune autre personne n’ayant la légitimité d’arbitrage. Mais surtout, il faut rappeler que la publication de la partition chant-piano est réalisée par Boosey & Hawkes dans le cadre de l’Offenbach Edition Keck, dont je suis directeur de publication. Selon notre contrat,  il incombe à moi seul la responsabilité du contenu fondamental des publications. Il me revient donc de décider à quelle place et dans quel volume des Contes d'Hoffmann chacun des avis divergents doit figurer. 

Donc à ce jour, si, comme on dit communément, chacun "joue le jeu", la publication de notre édition devrait voir le jour dans les mois qui viennent, après plus de vingt ans d'attente... Sinon....

Jean-Christophe Keck

 
   


7 FEVRIER 2005 : LA VERITE SUR LA PARTITION RETROUVEE A L'OPERA - DERNIERES DECOUVERTES SUR LA GENESE DE L'OEUVRE.

Ayant enfin pu consulter en détail cette fameuse partition qui fit couler tant d'encre dans une certaine presse l'été dernier, voici les premières conclusions qui apparaissent clairement :

- contrairement à ce que déclarait le service de communication de l'Opéra de Paris, et ce que reprenaient "joyeusement" quelques journalistes avides de sensationnalisme, il n'y a pas le moindre trait de plume de la main d'Offenbach dans cette partition. Que ce soit en ce qui concerne la musique ou toutes autres annotations.

- celle-ci fut rédigée par un copiste, d'après le chant-piano autographe orchestré par Ernest Guiraud. Elle contient, de plus, de nombreuses annotations apportées par ce dernier.

- Quelques pages supplémentaires sont entièrement de la main de Guiraud, dont le Prélude de l'acte 1, très certainement ajouté en dernière minute.

- elle ne représente certainement pas les dernières intentions d'Offenbach, mais celles de Léon Carvalho. D'ailleurs, elle ne comporte ni l'acte de Venise, ni le trio des yeux.

- l'Epilogue (un véritable champ de bataille) est en fait un assemblage de morceaux de partitions (de copiste et de la main de Guiraud) provenant entre autres de l'acte de Venise. Tout prouve d'ailleurs que ce dernier avait aussi été copié dans cette partition et finalement supprimé, puis réutilisé de façon fragmentaire pour construire en hâte un épilogue "qui tienne la route", puisque Offenbach n'avait pas eu le temps de rédiger celui-ci. On trouve d'ailleurs, égarées au milieu de ces collages, quelques pages du finale de Giulietta (de la main d'un copiste)... Notons aussi que c'est Guiraud qui écrit sur la dernière page de sa propre main : "Fin de l'Opéra"

Pourtant, cette partition recèle de nombreux trésors et a donc un intérêt certain. Premièrement, elle nous permet de connaître l'orchestration originale de différents passages jusqu'alors perdue (même si ce n'est malheureusement que celle de Guiraud...) : la partie centrale du chœur des Esprits, la transition instrumentale du duo Hoffmann - Lindorf, etc.

Par ailleurs, elle contient de nombreux détails qui nous permettent de suivre, étape par étape, les dernières heures de la genèse des Contes d'Hoffmann, lors des toutes dernières modifications. On y découvre par exemple des versions intermédiaires (avec mélodrames) de la scène de la Muse, les modifications apportées à la ligne de chant d'Hoffmann pour endosser plus facilement la tessiture de ténor (Offenbach ayant, dans son manuscrit, seulement commencé ce travail de substitution). On peut aussi y trouver la musique de la pantomime de l'acte de Venise (égarée au cinquième acte, mais clairement placée avant le duo Hoffmann-Giulietta (devenu le duo Hoffmann - Stella par la volonté de Carvalho).

En conclusion, et comme je le déclarais déjà cet été lors d'une interview dans Opéra International, cette partition n'apporte aucune nouveauté du point de vue musical. Aucune page inédite. Offenbach n'a en rien participé à sa rédaction. Elle ne peut aucunement modifier les fondements de l'œuvre, telle que nous la connaissons aujourd'hui. Outre les pages cousues ou biffées (véritable trésor que contient cet ensemble de cahiers non reliés), cette partition est simplement le reflet de la première édition imprimée par Choudens en 1881. Mais... en revanche, elle vient clairement soutenir nos travaux musicologiques et nos thèses (construites sur l'étude de l'ENSEMBLE des sources manuscrites et imprimées disponibles à ce jour) ; à savoir que :

- Offenbach a seulement eu le temps de rédiger la partition piano-chant des actes I à IV, hormis les préludes, entr'actes, mélodrames et pantomimes, réalisés par Ernest Guiraud (voir ci-dessous notre communiqué de février 2004).

- c'est ce même Guiraud qui a orchestré l'ensemble de la partition ; aucune des centaines de pages de la "grande partition" que nous connaissons ne comporte la moindre trace d'orchestration de la main d'Offenbach. (voir ci-dessous notre communiqué de février 2004).

- contrairement à ce que déclare Josef Heinzelmann, le livret de censure n'a certainement pas été établi du vivant d'Offenbach, et selon sa volonté. Tout porte à croire qu'il a été rédigé "post mortem" à partir des matériaux disponibles. Ce qui explique la version "indigente" du cinquième acte finalement retenue par Carvalho (après que Guiraud en ait proposé plusieurs moutures plus ou moins convaincantes à partir des esquisses laissées par Offenbach et des intentions de son librettiste Jules Barbier (chœur "Folie, oublie tes douleurs", reprise du chœur des Esprits, Apothéose, reprise de la légende de Kleinzach, etc.). Aujourd'hui, une reconstitution de l'épilogue s'impose, afin d'avoir une édition cohérente.

- même si le fait d'avoir retrouvé une partition de copiste des actes I et II est une avancée considérable dans nos recherches, il nous manque encore à ce jour les manuscrits autographes pour piano et chant orchestrés par Guiraud d'une large partie de ces deux actes. De la main de Guiraud, nous avons la scène de la Muse, le trio des Yeux et de nombreux passages de l'acte d'Olympia. De celle d'Offenbach, nous avons la quasi totalité des deux actes à l'état d'esquisses ou même de "grande partition" prête à être orchestrée. Mais par exemple nous n'avons rien sur les dernières mesures de l'Epilogue et cette fameuse gamme par ton si moderne que chante Hoffmann... Tout cela finira t'il un jour par réapparaître ?

NB : Grâce à l'aide de Vincent Giroud, Conservateur en chef du département musical de la Beinecke Library de Yale, nous avons pu effectuer une étude comparative des écritures figurant dans l'ensemble des manuscrits des Contes d'Hoffmann (Yale, BNF, Famille Offenbach, Collection Keck, etc.) et d'autres manuscrits autographes d'Ernest Guiraud (partitions musicales, lettres...). Nos conclusions ne laissent planer aucun doute quant à la paternité de l'orchestration des Contes d'Hoffmann. Elle est intégralement de la main de Guiraud (hormis quelques passages réalisés d'après celle-ci par un copiste). Ceci est manifeste depuis la première scène de la Muse jusqu'à la dernière page du finale de Giulietta. Ce travail a été rendu possible par la consultation récente de sources jusqu'alors bloquées. On peut s'étonner que cette étude n'ait jamais été faite sérieusement auparavant par les "chercheurs" qui avaient accès à ces documents... Car, même si les écritures d'Offenbach et de Guiraud sont parfois assez proches, en observant méticuleusement ces manuscrits, le doute n'est plus possible. En revanche, ce qui est particulièrement troublant, c'est que les récitatifs additionnels (généralement construits à partir des pages coupées par Carvalho) ne semblent pas être de la main de Guiraud. Il est certain qu'ils ne sont pas d'Offenbach. On sait qu'Auguste, le fils du Maître aida Guiraud à la préparation de la partition, mais ce n'est pas non plus son écriture...


8 FEVRIER 2005 : COMMENTAIRES DETAILLES CONCERNANT LA PARTITION D'ORCHESTRE DES CONTES D'HOFFMANN UTILISEE LORS DES PREMIERES REPRESENTATIONS DE L'OEUVRE.

- Tout porte à croire que cette partition a été copiée à partir du manuscrit autographe (Offenbach - Guiraud) avant que Guiraud n'apporte des modifications à sa propre orchestration ainsi qu'à la forme même de l'opéra (et particulièrement en ce qui concerne l'acte de Venise). En effet, les corrections de Guiraud figurant dans le manuscrit autographe sont reportées ici, par dessus le texte originel...

- Il est fort probable que ce soit cette partition qui ait servi à conduire les premières représentations, alors que le manuscrit autographe fut utilisé lors des répétitions et comme modèle pour la gravure de la partition d'orchestre de Choudens. D'ailleurs, aucun des récitatifs de Guiraud ne figure dans cette partition de copiste (contrairement au manuscrit autographe qui les contient tous). De plus, il existe beaucoup plus de différences entre cette partition et la version imprimée par Choudens qu'entre cette dernière et le manuscrit autographe. De nombreuses indications de tempi et autres de la main du chef d'orchestre Jules Danbé viennent aussi confirmer cette hypothèse. C'est vraiment la version "opéra-comique" dont nous disposons là, avec les annotations de répliques en tête de chaque numéro.

- La plupart des corrections et autres modifications sont de la propre main d'Ernest Guiraud. Certaines à l'encre brune, d'autres au crayon gris. Les corrections mineures (erreurs de notes de la part du copiste, oublis de nuances) sont faites au crayon bleu par Jules Danbé.

- Certaines pages sont entièrement de la main de Guiraud. Il s'agit en fait de modifications fondamentales, réalisées en dernière minute. A savoir, tout d'abord la composition du prélude de l'acte I. Il est probable qu'il fut question en premier lieu de commencer l'opéra directement par l'introduction intimiste du chœur des Esprits, avant de se rendre compte qu'il était nécessaire de bien marquer le début de l'oeuvre par quelques mesures orchestrales des plus puissantes, mais assez brèves afin que la volonté de Guiraud de s'effacer devant Offenbach soit clairement définie.

Nous parlerons des autres modifications majeures au fur et à mesure que nous avancerons dans la partition. Bien que nous ayons déjà passé trois jours à consulter celle-ci et à noter les différences rencontrées par rapport aux autres sources que nous connaissons, nous ne prétendons pas à l'exhaustivité. De moins pour l'instant... Les informations que nous vous donnons ici sont sans aucun doute les plus significatives :

- N° 1 Chœur des Esprits. L'orchestration de certains passages de ce chœur de coulisses fut considérablement allégée (quasiment a cappella avec une harpe, une flûte et une clarinette également en coulisses), et bien différente de celle employée aujourd'hui. Tout d'abord, les contretemps des "Glou-glou" furent déplacés sur le temps (pour pallier à un problème de mise en place), mais finalement remis à leur place première par Guiraud. Pourtant les différentes versions imprimées par Choudens ne tinrent jamais compte de ce retour aux volontés premières d'Offenbach... Notons surtout que nous découvrons ici l'orchestration originale de Guiraud en ce qui concerne la partie centrale de ce numéro. Que ce soit Oeser, Kaye ou moi-même, nous avions dû nous résoudre à orchestrer nous mêmes ce passage. La partie de harpe fut réécrite par Guiraud. Certaines parties de chœurs diffèrent aussi, ou sont purement supprimées...

- N° 1B Couplets de la Muse. Ce numéro fait partie des pages "à problèmes" qui ont été remaniées de nombreuses fois, avant d'être parfois supprimées tout simplement. On découvre ici (de la main de Guiraud) la volonté de transformer le récitatif "la vérité, dit-on" en une scène parlée sur fond de mélodrame. La musique est donc adaptée en ce sens. Ensuite, les protagonistes essaient une version nouvelle avec un air totalement différent reprenant la musique de l'Apothéose de l'acte V. Mais là aussi Guiraud tente un nouvel essai en transformant cet air en mélodrame, soutenant le monologue publié dans le premier livret imprimé. C'est certainement cette option qui fut retenue comme scène de la Muse, lors des premières représentations, et qui s'enchaîne avec la reprise du chœur des Esprits (toujours allégé du point de vue instrumental)...

- N° 2 : le récitatif de Lindorf figure dans cette partition, et ce, dans sa version longue comme l'avait prévu Offenbach dans ses esquisses pour chant et piano. Mais une page collée à la fin de celui-ci, et comprenant des indications de la main de Guiraud, ainsi qu'une réplique "Eh bien non ! cela ne sera pas" prouve qu'il fut supprimé et remplacé par le dialogue que l'on trouve dans le premier livret imprimé.

Dans les numéros qui suivent, de nombreuses indications de la part du chef d'orchestre (jusqu'alors inconnues) nous apportent de nouvelles informations sur l'interprétation de cet opéra. Et n'oublions pas qu'Offenbach assista aux premières répétitions avec piano et que ses dernières volontés musicales furent très certainement respectées et reportées ici par Danbé.

- N° 4A : les personnages de Wolfram et Wilhelm figurent toujours dans cette partition. Ils n'ont pas encore été "absorbés" par Nathanael et Hermann... On commence à trouver aussi quelques modifications au crayon gris dans le livret ("Vive Dieu" au lieu de "Vrai Dieu", "Et Nicklausse est avec lui" au lieu de "Et son ombre est avec lui" ). On trouve aussi certaines modifications mineures du point de vue musical : le "Au diable Hoffmann" de Lindorf est raccourci de deux temps...La ligne vocale d'Hoffmann est parfois modifiée, ainsi que le rythme de certaines phrases de Nicklausse...

- N° 5 : on trouve ici un enchaînement différent entre la légende de Kleinzach et la scène qui la précède. En fait, il s'agit d'une première version orchestrée par Guiraud (et qui reprend les volontés exprimées par Offenbach dans sa version "Hoffmann baryton". Celle-ci est d'ailleurs ici même corrigée par Guiraud et enfin conforme à ce qui sera ensuite imprimé par Choudens. Ou du moins, presque... Par ailleurs, nous découvrons ici une version plus étoffée de l'orchestration de la rêverie d'Hoffmann, avant qu'elle soit biffée par Guiraud lui-même. Certains passages ont été allégés ; d'autres carrément modifiés.

- N° 6 : la découverte la plus importante dans ce final de l'acte I est peut-être l'orchestration originale de Guiraud de la transition entre les deux couplets du duetto Hoffmann-Lindorf. Mais surtout, c'est l'existence d'une mesure totalement inédite à la fin du second refrain, finalement biffée par Danbé. Ce n'est qu'une mesure, mais celle-ci modifie considérablement le caractère musical de la transition avec l'ariette de Nicklausse "Simple échange de politesse".

- Entr'acte du II : initialement, le thème du couplet "Ca, Monsieur Spalanzani" était prévu au trombone. Finalement, Guiraud adopta une version pour basson...

- N° 7 : le début de la scène est originellement écrit un ton plus haut, avec la demande expresse de "baisser d'un ton jusqu'à la lettre D page 17". La ligne vocale d'Hoffmann diffère parfois de tout ce que l'on connaît. La version remaniée par Guiraud (avec l'air d'Hoffmann "Ah vivre deux") a été intégrée au milieu de la version originelle. L'ariette de Nicklausse est proposée "un ton plus bas pour Mlle Chevalier" grâce à une modulation indiquée sur une feuille collée.

- Notons que le trio des yeux ne figure pas dans cette partition. Il fut certainement copié, mais facilement retiré de cette partition qui est en fait un ensemble de cahiers non reliés entre eux et réunis acte par acte..

- N° 9 : tout le début de la partie chorale a été supprimé. L'entrée en scène du chœur se fait donc sans chanter, et les artistes entonnent leurs premières phrases sur la reprise du "Non, aucun hôte vraiment", à la 38ème mesure... Les onze mesures qui précédent la chanson d'Olympia sont baissées d'un demi-ton. Ce qui permet d'arriver dans la tonalité de l'air, en La b majeur, contrairement à ce qui se pratique habituellement, avec une transition brutale (de La à La b)... Sous les dernières vocalises de la Poupée, Monsieur Danbé (ou Madame Isaac) a demandé aux chœurs de s'abstenir de chanter...

- N° 10 : nous découvrons une orchestration plus étoffée pour l'air d'Hoffmann "Ah vivre deux".

- N° 11 : on trouve là aussi les deux versions (originelle et revue par Guiraud) de ce numéro. Pas mal de modifications d'orchestration. Mais surtout deux mesures restituées enfin correctement dans le duetto Hoffmann - Nicklausse (un ton plus haut que ce que l'on connaissait jusqu'alors).... Le manuscrit de Yale orchestré par Guiraud étant différent de l'esquisse d'Offenbach, mais par ailleurs incomplet, il était indispensable d'avoir ce passage tout entier pour pouvoir le restituer correctement. Ce sera bientôt chose faite dans notre nouvelle co-édition... La fin du duetto et le retour de Coppélius présentent aussi quelques tentatives de modifications instrumentales....

- N° 12 : certainement le numéro le plus intéressant de la partition pour la découverte qu'il nous apporte... Outre la petite valse orchestrale qui figure ici (comme dans la partition Choudens), la suppression des chœurs sous les vocalises d'Olympia, et quelques autres petits détails, nous avons trouvé, cachées sous une feuille collée par Guiraud, trois mesures inédites et originales d'Offenbach, au moment où Hoffmann découvre que sa fiancée est un automate. Comme pour le finale de Giulietta, Guiraud a voulu renforcer l'action dramatique en remplaçant une musique mesurée par un récitatif amené de façon brutale et contrastée. Cette nouvelle mouture aide aussi à la compréhension du texte. Mais, contrairement à ce que l'on croyait, elle n'est pas d'Offenbach....

En ce qui concerne l'acte III :

- la « Barcarolle » est donc placée après la Romance d’Antonia. On a utilisé là un montage du début de l’Entr’acte et de la Barcarolle pris dans la l’acte IV supprimé (provenant de toute évidence de cette même partition de copiste). On y découvre une nouvelle instrumentation de Guiraud destinée à cette transposition pour « voix en coulisses » avec le soutien d’un piano. L’orchestrateur écrit d’ailleurs : « Otez la petite flûte, le hautbois, le triangle »… Mais ce qui est particulièrement intéressant, c’est de découvrir que, malgré le recopiage de la partition autographe des Fées du Rhin (à la demande de Guiraud), il n’a jamais été question d’employer deux harpes (et trois flûtes) à l’Opéra-Comique. Dans un premier temps, seule la partie de seconde harpe a été retenue. Ensuite, Guiraud l’a adaptée de sa propre main et au crayon gris. Puis, il en propose une toute nouvelle version spécifique à la nouvelle mouture de ce numéro, transportée dans l’acte d’Antonia, pour accompagner « dans la coulisse » les voix de femmes. 

- des modifications d’orchestration figurent dans l’air de Frantz, d’abord ajoutées par Guiraud, puis biffées par Danbé, certainement pour résoudre des problèmes d’équilibre sonore entre le plateau et la fosse. La ritournelle d’introduction est recouverte par une page collée et entièrement rédigée par Guiraud, conforme aux dernières volontés de ce dernier, et que l’on retrouve dans l’édition Choudens. 

- la romance de Nicklausse « Vois sous l’archet frémissant » ne figure pas ici. Pas plus d’ailleurs que dans le livret de censure. Maintenant que nous savons que ce document a été réalisé post mortem, il est difficile de savoir si Offenbach avait lui-même souhaité le supprimer de son opéra. Pour mémoire, rappelons que seul nous restent une version chant-piano autographe de ce numéro ainsi que les esquisses du récitatif qui devait le précéder. 

- le duo Hoffmann-Antonia est précédé de quatre mesures en La majeur, chantées par Hoffmann s’accompagnant de la harpe sur le thème de « C’est une chanson d’amour », et de quelques répliques. Avant de modifier et de raccourcir considérablement le début du duo, Guiraud tente d’abord une première adaptation en supprimant quelques mesures, en en modifiant d’autres… On trouve d’ailleurs dans cette partition les différentes versions de cette introduction. La décision de Guiraud d’accompagner le duo « J’ai le bonheur dans l’âme » par les pizzicati de cordes et non arci, est ici clairement signalé. Notons pour finir quelques adaptations orchestrales afin d’aider les chanteurs sur leurs fins de phrases… 

- le trio suivant (Hoffmann–Crespel–Miracle) contient de nombreuses corrections d’orchestration. Ce sont les mêmes que celles qui figurent dans le manuscrit autographe qui se trouve à la bibliothèque de l’Opéra. Mais ce qui est très intéressant ici, et contrairement à l’autre manuscrit, c’est que ces corrections sont portées avec des encres différentes. Ainsi, on constate que dans l’introduction, les parties de bois ont été effacées au grattoir et remplacées par les cordes, ce qui diffère des éditions critiques récentes qui associent l’ancienne et la nouvelle orchestration (bois et cordes)… Mais à la décharge de celles-ci, il n’était pas possible de faire la part exacte des choses en s’appuyant seulement sur le manuscrit de la bibliothèque de l’Opéra. On retrouve d’ailleurs le même cas de figure dans d’autres numéros. Maintenant que nous savons qu’Offenbach n’a pas orchestré sa partition et que les corrections de Guiraud concernent finalement la première étape de son propre travail, nous nous devons de réviser considérablement notre future édition en adoptant la dernière version de Guiraud et en signalant à titre consultatif ses premières intentions (comme dans toute édition critique qui se respecte). Là encore nous constatons combien cette partition de copiste peut nous aider considérablement, même si c’est de façon aussi inattendue… 

- le livret imprimé de 1881 fait état d’un récitatif (Guiraud) précédant le trio final. Je pensais donc le trouver dans cette partition. Et bien non ! Notons seulement qu’on est ici confronté aux mêmes corrections d’orchestration(s) que l’on trouve dans l’autographe conservé au Palais Garnier. Mais dans cette partition, les choses apparaissent plus clairement et il est beaucoup plus facile de suivre les différentes étapes de modifications. 

L’acte de Venise ayant été coupé par Carvalho, il ne figure donc pas dans cette partition. Comme nous l’avons fait pour la Barcarolle, transportée chez Antonia, nous parlerons donc du duo Giulietta-Hoffmann et de la Romance de ce dernier « Ô Dieu, de quelle ivresse » dans l’Epilogue, appelé ici « acte IV ». Comme je l’ai dit plus haut, celui-ci est un véritable champ de bataille dans lequel on peut suivre la première version publiée par Choudens en 1881, et ce au milieu de divers restes et scories d’anciennes tentatives de reconstitution. En voici le détail : 

- l’Entracte est dans sa version courte, sans les mesures d’introduction composées par Guiraud comme transition à l’intermède qu’il insèrera plus tard. 

- le chœur a cappella « Folie, oublie tes douleurs » ne figure pas dans la partition. 

- on y trouve en revanche de larges fragments (barrés) du double-chœur des Esprits et des Etudiants (finalement remplacé par la reprise du chœur « Allumons le punch » avec les nouvelles paroles « Vidons les tonneaux ») avec de nombreuses tentatives de modifications par rapport au manuscrit de Guiraud conservé à Yale, surtout en ce qui concerne le début et la fin du numéro. 

- on trouve ensuite le mélodrame (publié dans la première édition Choudens) qui devait servir à accompagner la déclamation de la Muse sur la musique de l’Apothéose, avec différentes tentatives d’enchaînements… Puis, quelques pages de la partition coupée de l’acte de Venise, à savoir la romance d’Hoffmann « Ô Dieu, de quelle ivresse » adaptée à la circonstance. 

- un point très intéressant : au milieu de ce fatras s’est perdue une autre page de l’acte IV, intitulée « n°19 », copiée juste avant le début du duo Hoffmann-Giulietta (devenu Hoffmann-Stella). Il s’agit en fait d’un des quatre mélodrames (18 bis à 18 quinter) composés par Guiraud comme soutien musical aux dialogues du début de l’acte de Venise (entre les Couplets bachiques et la Scène de jeu). Ces différentes pages manuscrites de la main de Guiraud se trouvent à Yale. Une d’entre elles porte la réplique « Nous avons tant souffert », ce qui porte à croire qu’au moment où cette scène était répétée, le texte des acteurs différait du livret de censure. Mais la partition de copiste de Paris nous apporte de nouvelles informations. Le mélodrame comporte en bas de page la didascalie « Giulietta prend l’anneau » [que lui tend Dappertutto], ce qui nous permet de bien situer la place initiale de cette musique dans les scènes parlées (il s’agit en fait de la seconde entrée de Giulietta). Mais le plus intéressant est le fait que dans la partition de copiste, cette page figure juste avant le duo Hoffmann-Giulietta. Ce qui prouve qu’elle a finalement été utilisée comme musique de scène accompagnant la pantomime du duel qui permet le changement de décor après le premier tableau. Notons d’ailleurs que ces musiques de scène ont dû être déplacées et transposées plusieurs fois, vues les différentes ratures et surcharges figurant sur leur numéro respectif, et la place qu’elles occupent aussi dans une partition chant-piano très rare publiée par Choudens (certainement pour la première reprise de l’ouvrage avec l’acte de Venise – peut-être au théâtre de la Renaissance…) Enfin, remarquons que l’orchestration pour quatre cors a été remplacée à cet effet par le quintette à cordes. 

- vient donc ensuite le duo Hoffmann–Giulietta, adapté en duo Hoffmann–Stella. Guiraud a copié de sa propre main le nouveau livret. Les énormes modifications orchestrales que l’on connaît déjà par les manuscrits se trouvant dans la famille Offenbach ont été reportées ici aussi. Une fois de plus, la première orchestration de Guiraud (beaucoup plus fidèle aux vœux d’Offenbach, mais aussi beaucoup plus contraignante pour la voix d’Adèle Isaac) est bien difficile à déchiffrer sous les ratures. A la fin de ce numéro, Guiraud tente différentes transitions. 

- on trouve alors quelques pages du Finale de Giulietta, égarées au milieu de cet épilogue (car faisant partie du même cahier de papier-musique que le duo précédent). La dernière page a d’ailleurs été utilisée comme support à un essai de nouvelle fin pour le duo Hoffmann-Stella. 

- un mélodrame (Guiraud) sert ensuite à introduire la reprise de la Légende de Kleinzach, qui s’enchaîne elle-même avec le chœur des «étudiants « Jusqu’au matin remplis mon verre » rédigé entièrement par la main de Guiraud. Celui-ci a d’ailleurs tenté deux transitions harmoniques différentes. 

- enfin, sur cette dernière page, Guiraud écrit de sa plume nette et bien reconnaissable : « Fin de l’opéra ». Figure ensuite le tampon apposé quelques années plus tard, mais - ô combien - symbolique : Théâtre National de l’Opéra-Comique – Albert Carré – Propriété de l’Etat.  

© Jean-Christophe Keck – Février 2005



FEVRIER 2004
LES CONTES D'HOFFMANN : DERNIERES DECOUVERTES.

Depuis près de vingt ans, des sources de premier ordre concernant Les Contes d'Hoffmann, le chef d'œuvre posthume de Jacques Offenbach, avaient été rendues inaccessibles de par la volonté de leur propriétaire. Depuis peu, ces manuscrits sont la propriété de la Bibliothèque de Yale, et sont enfin consultables. Leur examen approfondi, ainsi que celui des documents se trouvant à la Bibliothèque Nationale de France, dans la famille Offenbach, et enfin les manuscrits dont nous sommes propriétaires, nous permettent de pouvoir annoncer avec certitude les points suivants :

Offenbach a eu le temps de composer l'ensemble de la partition chant-piano des actes 1 à 4, hormis les préludes, entractes et autres mélodrames. En ce qui concerne l'acte 5, il a produit des esquisses plus ou moins complètes (voix et piano avec parfois quelques idées d'orchestration) pour le chœur "Folie, oublie tes douleurs", le duo Hoffmann / Stella, l'Apothéose avec chœurs. Les différentes versions du livret autographe de Jules Barbier permettent de savoir comment il envisageait d'utiliser cette dernière musique, ainsi que la reprise de la légende de Kleinzack. Dans l'ensemble des manuscrits que nous connaissons maintenant, l'écriture d'Offenbach n'apparaît à aucun moment dans l'orchestration. Celle-ci est généralement de la main d'Ernest Guiraud (et parfois de celle d'un copiste anonyme), que ce soit du premier chœur de l'acte 1 jusqu'au final de l'acte 4. Il apparaît donc que les déclarations d'André Martinet, le premier biographe d'Offenbach, sont bien fondées, soutenues par une lettre qu'Offenbach écrivait à son épouse quelques semaines avant sa mort : "il me reste juste un mois pour faire le troisième acte de Belle Lurette, orchestrer les trois actes, faire le finale (NDR : de l'acte 4) et tout le cinquième acte des Contes d'Hoffmann (je ne parle même pas de l'orchestration qui viendra plus tard)"... A la lueur des dernières découvertes, il apparaît clairement que c'est de l'orchestration de tout l'opéra dont parlait Offenbach et non pas simplement du dernier acte de la pièce, comme nous le crûmes avant de pouvoir accéder à l'ensemble des sources... Par ailleurs, il apparaît que le livret de censure a été construit après la mort d'Offenbach, en utilisant fidèlement les manuscrits autographes laissés par le compositeur en ce qui concerne les actes 1 à 4. Mais pour ce qui est de l'acte 5, il s'agit simplement d'une version construite par Jules Barbier et Léon Carvalho à partir des quelques matériaux exploitables, et ce, sans l'avis du compositeur. Dans un même temps, une autre version de l'acte 5, plus étoffée, mais finalement abandonnée, fut d'ailleurs tentée par Guiraud : reprise du choeur des Esprits mêlé à celui des Etudiants, ariette de Stella avec chœurs (qui semble être une composition personnelle de Guiraud), nombreux mélodrames...

Petit à petit, le voile est levé, et les mystères qui entourent cet opéra fantastique se dissipent un à un. A l'heure actuelle, une édition scientifique et exhaustive des Contes d'Hoffmann est possible, rassemblant l'ensemble des sources disponibles et permettant de représenter une œuvre cohérente et d'une immense richesse musicale et dramatique...

Bientôt, un long article sur la VRAIE genèse des Contes d'Hoffmann... et un communiqué sur la nouvelle co-édition Michael Kaye - Jean-Christophe Keck (Schott/Boosey & Hawkes)

Succession Roger Roger, vers la cours d'appel...

Il m'est difficile de décrire le sentiment d'injustice qui est le mien depuis le jugement rendu à mon encontre le 4 Décembre dernier par le Tribunal Correctionnel de Lyon. Je ne me sens coupable de rien et certainement pas d'avoir abusé de quelqu'un que j'aurais su être vulnérable. J'ai donc relevé appel de cette décision et j'ai la conviction que la justice dans un avenir que j'espère proche m'innocentera aux yeux de tous.

Malgré la demande expresse de la part de mon avocat de ne faire aucune déclaration suite au verdict rendu par le tribunal, je souhaite pourtant écrire ce texte explicatif afin que mes amis et mon entourage n’interprètent pas mal mon silence.

A l’automne 2006, grâce aux recommandations des journalistes Pierre-Marcel Ondher et Pierre Thibaud, je suis rentré en contact avec Eva Roger, veuve du compositeur Roger Roger pour qui je voue une véritable admiration depuis l’âge de 15 ans (ceux qui ont assisté à mes concerts ou ont écouté mes émissions radio le savent bien). Une relation autant amicale que professionnelle s’en suit avec Eva Roger, qui en plus d’être très attachée à la mémoire de son époux, est une grande admiratrice d’Offenbach. Elle, ainsi que son frère Heinz ont d’ailleurs enregistré Les Contes d’Hoffmann à plusieurs reprises. Et coïncidence, c’est en entendant Heinz Rehfuss dans le rôle des diables que je suis tombé amoureux des Contes d’Hoffmann alors que j’étais adolescent. 2006 est aussi l’époque où je collabore régulièrement avec l’Orchestre Pasdeloup, dont j’assure la programmation artistique de la saison Offenbach. Madame Roger a une âme de mécène. Elle a déjà financé et produit de nombreux projets de CD et DVD avec différents artistes : l’Orchestre de musique légère de Paris, les DVD de Dominique Nohain, les CD de Mélisande Chauveau, etc. Nous réalisons ensemble et avec les solistes de l’Orchestre Pasdeloup un premier album “Folies dansantes chez Offenbach” publié par le label Orphie 58 créé pour l’occasion, ainsi qu’une série d’émissions radio consacrée à Roger Roger pour France Musique. Différents projets d’enregistrements sont lancés. Pour moi c’est une bénédiction d’avoir pu rencontrer quelqu’un qui partage ainsi mes passions musicales et qui souhaitent soutenir celles-ci. Avec l’Orchestre Pasdeloup, la musique de Roger Roger est présente dans tous mes concerts, et appréciée autant par le public que par les musiciens de l’orchestre. Faire découvrir ce musicien aussi génial qu’oublié, c’est la nouvelle mission que je me suis fixée, parallèlement au combat que je mène depuis trente ans pour la musique d’Offenbach. Mais contrairement au patrimoine de ce dernier éparpillé aux quatre coins du monde, Eva Roger fait tout ce qui est en son pouvoir pour valoriser celui-ci et faire vivre l’œuvre de son défunt mari. Nous projetons alors la publication des nombreuses bandes qui dorment dans le studio que Roger Roger avait créé au sous-sol de sa maison. 
En 2007, la direction de l’Orchestre Pasdeloup décide de réduire le nombre de concerts de la saison Offenbach. Problème de salle et de budget. Une opportunité se présente en décembre 2007 grâce à mon ami Jacques Bourdon, descendant direct d’Offenbach et propriétaire des murs du Théâtre des Bouffes-Parisiens. Celui-ci propose à l’administrateur du théâtre d’héberger gracieusement quelques concerts Offenbach. Dès le mois de février 2008, il est convenu avec Eva Roger que celle-ci apportera son soutien à quatre “lundis d’Offenbach des Bouffes-Parisiens” à hauteur de 5000 euros par concert. Le 21 mars, Eva Roger me confirme par email qu’elle a mis 20000 euros de côté pour les concerts à venir. Nous correspondrons principalement par email car je vais seulement un ou deux jours par mois à Paris dans le cadre de mes activités professionnelles passant le reste du temps dans les Hautes-Alpes. Malheureusement, quelques jours plus tard, Eva Roger va être hospitalisée d’urgence au Chesnay suite à un accident vasculaire cérébral. Elle souffre alors d’une hémiplégie. Eva est une battante et sa rééducation dans une maison spécialisée à Louveciennes va lui permettre de retrouver rapidement une bonne partie de ses facultés (la parole et une partie de sa motricité). Je vais lui rentre visite deux fois, lors de mes séjours parisiens. Elle se plaint de la qualité des soins et sur les conseils d’une amie suisse, elle organise son départ pour une clinique à Montreux. Le projet d’aide au financement des concerts Offenbach aux Bouffes-Parisiens n’en est pas pour le moins abandonné, et étant loin de Paris, c'est par l’intermédiaire de l’avocate d’Eva Roger, Maitre Michèle de Kerckhove que l’association que je préside depuis sa création en 1996, le CIDJO, va recevoir un chèque de 20000 euros (libellé par Me de Kerckhove et signé par Eva Roger). Même si les concerts sont prévus pour l’hiver suivant, la saison de l’orchestre se met en place depuis le mois de mars et il est indispensable d’avoir des garanties financières avant de s’engager. Seulement deux concerts auront lieu par la suite, en 2008 et 2009, le succès n’étant pas au rendez-vous par manque de promotion. En encore nous pouvons être heureux d’avoir réuni un peu de monde sans aucun affichage. 10000 euros seront remis à l’Orchestre des concerts Pasdeloup (financement des deux premiers concerts) et 10000 euros resteront sur le compte du CIDJO. Ils y sont encore, Eva Roger étant décédé entre temps. A noter qu’Eva Roger avait clairement exprimé son désir que cet argent transite par mon association afin de pouvoir en garder le contrôle et qu’il soit utilisé pour un projet Offenbach et pas pour autre chose. Ce que je ne savais pas, c’est qu’en avril un médecin déclarait que Madame Roger avait des moments de confusion mentale. Or ce chèque a été fait après cette déclaration… C’est pourquoi j’ai été accusé d’abus de faiblesse sur la personne d’Eva Roger. Et le juge de dire que si effectivement Madame Roger avait projeté de financer ces concerts avant son AVC, elle ne voulait « peut-être » pas les financer après. Et c’est pour ça qu’on me condamne. Et pour rien d’autre, contrairement à ce qu’a pu raconter ou laisser entendre la presse alimentée par la partie adverse. Cette condamnation est d’autant plus injuste que Madame Roger n’avait nullement perdu la tête, comme le prouve nos échanges d’emails du mois de juin, ainsi que les témoignages d’une partie de ses proches (ceux qui justement n’ont rien à perdre en disant la vérité). A signaler par ailleurs que je n’ai pas touché un centime directement ou indirectement sur la somme qui a été versée à l’Orchestre Pasdeloup puisque j’ai dirigé gracieusement ces deux concerts, comme de coutume. Tous les documents prouvant ce que j’avance ont pourtant été remis par mon avocat au juge d’instruction qui n’en a pas tenu compte. Emails, attestations de l’orchestre, etc. Ce que je n’arrive toujours pas à comprendre... Et ce, malgré une enquête de gendarmerie très poussée qui concluait pourtant à mon innocence. Toujours est-il que me voilà condamné pour un crime que je n’ai pas commis. C’est une situation aussi kafkaienne qu’insupportable… Evidement, tout cela est fait dans le seul but de faire annuler le legs ou plutôt la mission qu’Eva Roger a souhaité me confier par testament plus d’un an avant sa mort, à savoir la sauvegarde patrimoniale de l’œuvre de son mari, la partie adverse (le fils d’Eva, et non pas de Roger Roger, qui était fâché depuis de nombreuses années avec sa mère, mais dont l’appât de gains faciles est le seul moteur) n’a pas d’autres dessins et ne recule devant rien pour arriver à ses fins. Contrairement à ce qu’ont écrit les journalistes, Eva Roger n’a pas modifié son testament en ma faveur juste avant sa mort mais, alors que je lui proposais de créer une fondation pour la sauvegarde du patrimoine de son mari, c’est 10 mois avant qu’elle ne fasse son AVC qu’elle rédigeait dans ce sens et devant notaire un testament authentique. Et si les droits d’auteur n’étaient pas, de fait, rattachés aux partitions, la partie adverse n’aurait certainement pas remis en cause les dernières volontés de Mme Roger. D’ailleurs, au tribunal civil la partie adverse a été systématiquement déboutée et condamnée : en premier instance, en appel, en cassation, en demande de révision de procès. Huit ans que cela dure. Avec une situation bloquée et de nombreuses turpitudes sur lesquelles je ne vais pas m’étendre : avances indûment perçues et jamais remboursées malgré la demande expresse du Tribunal, amandes à mon encontre jamais réglées... Un total mépris de la justice...
Voilà. Je remercie tous ceux qui m’ont soutenu dans ces moments d’une violence et d’une cruauté inouïe. Je ne désespère pas que les juges de la Cour d’appel daignent écouter mes arguments et sachent, contrairement aux médias, ne pas faire d’amalgames entre cette histoire et la sordide affaire Bettencourt.

Hommage à Rossini, pour violoncelle et orchestre

Une petite anecdote d'archéologie offenbachienne que j'ai envie de vous raconter.   Mon éditeur Boosey & Hawkes reçoit une demande d'une violoncelliste allemande. Elle a entendu parler d'une pièce d'Offenbach pour violoncelle et orchestre intitulée "Hommage à Rossini" et aimerait la donner en concert". Frank Harders, mon principal collaborateur chez Boosey & Hawkes me demande donc s'il est possible de faire une nouvelle édition. Je suis enthousiaste et optimisme car j'ai le souvenir d'avoir croisé des manuscrits de cette oeuvre lors de mes dernières découvertes dans la famille Offenbach. Malheureusement je dois vite déchanter car les manuscrits en question sont en fait seulement l'ensemble des parties d'orchestre qui ont servi lors de la création et des différentes reprises. Et encore, il manque une partie d'alto et une de trombone, mais par bonheur je les avais déjà localisés il y a une quinzaine d'année dans une collection privée en Suède... Donc, pour le moment, nous pouvons reconstituer toute la partie orchestre mais il nous manque l'essentiel, c'est à dire la partie de violoncelle solo qui figure seulement dans la partition d'orchestre autographe. Est ce que celle-ci est accessible ? Cherchons dans mes listes ! Ouf ! le titre y apparait. Il y a quelques années j'ai eu accès dans une autre branche de la famille Offenbach aux... 10 dernières pages de ce précieux manuscrit. Et le reste ? En recherchant dans mes notes, je trouve la trace des 18 premières pages (le reste du manuscrit) dans le catalogue d'un antiquaire allemand. De fil en aiguille, je retrouve ces pages dans catalogue des Archives Historiques de la ville de Cologne qui comme vous le savez peut-être (on n'en parle plus guère) ont été détruites il y a quelques années suite à l'effondrement totale de l'immeuble. Par bonheur, l'université de Koblenz a microfilmé une bonne partie du fonds Offenbach de cette bibliothèque. Mais, par malheur, un directeur du département musical de l'université en question a jeté "par hasard" aux ordures (certains parlent plutôt d'un acte de vengeance) l'ensemble de ces microfilms... Mais par bonheur j'ai pu faire des tirages sur papier de la quasi totalité de ces microfilms avant leur destructions. En définitive, nous pourrons donc faire une édition de cet "Hommage à Rossini". Et ça ce passe très souvent comme ça...

Les Contes d'Hoffmann : dernière trouvaille - 13 février 2016

Résumons d'abord la situation en ce qui concerne les sources. Pour mémoire, Offenbach a laissé sa partition quasiment achevée sous forme de chant-piano prêt à être orchestrée. C'est à dire le prologue et les trois actes suivants (Olympia, Antonia, Giulietta). Quant à l'épilogue, il n'a laissé que des esquisses. Cette partition a été utilisée lors des répétitions en présence d'Offenbach durant les derniers jours de sa vie. A la mort du maître, c'est à Ernest Guiraud que revient la tâche d'orchestrer la partition, de la compléter (le prélude, les entractes et les mélodrames), et de mettre sur pieds un épilogue en utilisant les esquisses laissées par Offenbach. 

Cette partition où apparait donc l'écriture d'Offenbach pour les parties vocales et celle du piano, ainsi que l'écriture de Guiraud pour les parties instrumentales, cette partition étrangement disloquée acte par acte et éparpillée de par le monde, nous en connaissions la situation, du moins en ce qui concerne plusieurs fragments. L'acte d'Antonia et l'ultime reconstitution de l'épilogue (Guiraud en a tenté plusieurs) se trouve à la Bibliothèque Nationale de France. L'acte de Giulietta se trouve dans les archives de la famille Offenbach. Toutes les coupures faites la veille de la création se trouvent en partie aux Etats-Unis à la Bibliothèque Universitaire de Yale ainsi que dans mes propres archives (le finale de l'acte). Il nous manquait donc le prologue et l'acte d'Olympia pour connaitre précisément les dernières volontés musicales d'Offenbach. Depuis des années je cherchais ce manuscrit. Grâce à l'aide précieuse de la famille Offenbach, nous l'avons enfin trouvé ce samedi 13 février. Fait étrange : je venais justement de rédiger le texte de la conférence que je donne ce soir à Berlin sur Les Contes d'Hoffmann où je m'apprêtais à expliquer au public qu'une grande partie du manuscrit autographe des Contes d'Hoffmann n'est toujours pas localisé. Je dois corriger ma copie. Mais avec quelle bonheur ! Quels frémissements ! Et quelle joie indicible. J'espère au moins que cette découverte majeure va nous permettre d'avancer dans une situation éditoriale qui s'enlise depuis des années et des années.

Offenbach dénaturé - Samedi 24 février 2007

Offenbach dénaturé - Samedi 24 février 2007

 Ce vendredi 23 février, un article paru dans Le Figaro m’interpelle. Il s’agit d’une interview recueillie par Jean-Louis Valdire auprès de Loic Boissier et Benjamin Levy, les principaux protagonistes de la troupe « Les Brigands » qui donne actuellement au Théâtre de l’Athénée une adaptation de la pièce éponyme d’Offenbach. A en croire des déclarations qui n’ont d’autres buts que de justifier les arrangements musicaux pratiqués sur la partition du père des Contes d’Hoffmann« les matériels d’orchestre ont malheureusement disparus »« au théâtre des Bouffes Parisiens, il n’y avait pas quarante musiciens dans la fosse qui est microscopique »… Devant une pareille mystification, je suis en droit de me demander à quoi sert finalement le travail d’édition musicologique entrepris autour de l’œuvre d’Offenbach depuis bientôt dix ans ? A quoi sert mon combat de trente ans pour un « Offenbach authentique » ? Il suffit pourtant d’aller sur Internet pour constater qu’il existe une édition critique des Brigands, les matériels d’orchestre, ni même le manuscrit autographe n’ayant jamais disparu (ce dernier passait d’ailleurs en vente chez Sothebys il y a quelques années). Quant à la légende des fausses d’orchestres minuscules ne pouvant contenir que quelques musiciens, je pensais qu’elle a avait vécu. Il suffit de consulter une biographie sérieuse d’Offenbach pour savoir que les théâtres où furent crées ses pièces ont été particulièrement réorganisés depuis un siècle (privilégiant le confort du public au détriment de l’espace artistique), que la fosse des Bouffes-Parisiens (passage Choiseul) pouvait contenir une trentaine de musiciens, et celle des Variétés (où ont été créé Les Brigands), entre 30 et 40… Je me souviens du même genre de déclarations faite par Laurent Petitgirard il y a plus de 20 ans, au sujet de son orchestration nouvelle de La Vie parisienne représentée au Châtelet – il soutenait alors qu’Offenbach n’avait jamais orchestré sa partition... Le manuscrit autographe est pourtant bien localisé et une édition critique a été publiée depuis et jouée de par le monde. Mais que n’inventerait on pas pour justifier la nécessité d’un travail d’adaptation et les nombreux avantages qui peuvent en découler… Donc, si j’en crois les déclarations de nos deux «Brigands », je ne peux que constater, avec amertume, que les mentalités n’ont pas beaucoup évolué en un quart de siècle. Pourtant, j’ai l’impression qu’on vole le public en lui vendant des OGM (de l’Offenbach génétiquement modifié) au lieu de l’original. Malheureusement, peu s’en indignent. Pensez-vous qu'Offenbach mérite plus qu’un autre un tel traitement musical ?Applaudirait on avec autant d’enthousiasme à un Verdi ou un Wagner orchestralement dénaturé, et de surcroît pour 15 instruments ? Ce n’est pas la même chose, me répondront certains ! Ah bon ? Ce genre de ségrégations aussi, je pensais qu’elles n’avaient plus lieu d’être depuis la redécouverte de chefs d’œuvres comme Les Fées du Rhin ou Fantasio… Ce qui est d’autant plus regrettable, en ce qui concerne le spectacle de l’Athénée, c’est que cet opéra bouffe pourrait être joué dans son instrumentation originale avec seulement 18 musiciens (en diminuant l’effectif de cordes à un minimum indispensable). Le texte original serait sauvé et on pourrait ainsi apprécié à sa juste valeur le génie mozartien d’Offenbach. Ce ne doit pas être l’avis de Benjamin Levy, qui déclare en guise de conclusion : « C’est aussi une musique en friche.  Il y a des partitions à redécouvrir qui ont été malmenées dans certaines interprétations » Effectivement, celle de la troupe des Brigands en est bien le dernier exemple en date…  « On a l’impression qu’il faut se réapproprier ce répertoire pour lui rendre hommage ». Le plus bel hommage à lui rendre, c’est avant tout de le respecter en rendant justement à César, ou plutôt à Offenbach, ce qui lui appartient.